vendredi 23 septembre 2011

Dimanche

Le soleil était déjà haut dans le ciel et malgré les volets fermés, une large raie de lumière entrait dans leur chambre. Ils s'étaient couchés tout habillés. Les vêtements d'abords trempés de sueur, puis séchés sur la peau, collaient. Hermione se sentait un peu vaseuse et ses yeux la tiraillaient légèrement. Ce rayon de soleil impertinent l'avait réveillée quand sa course s'était arrêtée sur ses paupières closes. Elle s'étira et tenta de se rendormir en se retournant, mais le sommeil l'avait définitivement fuit. Le grincement du lit s'accorda avec le craquement de son dos. Une douleur sourde se logea entre deux vertèbres. Se contorsionnant d'un côté et de l'autre elle tenta de s'en séparer, mais le mal ne la quitta pas. La salle de bain était son refuge. Il fallait se laver de la crasse et de l'engourdissement. L'eau coulait, finissant de la réveiller complètement. Elle entreprit même de laver ses cheveux emmêlés. La magnifique chevelure de naïade avait disparu dans la nuit. Il n'y avait plus que nœuds et transpiration.

Elle sortit toute fraîche et parfumée de sa longue douche. Drago lui était toujours affalé dans leur lit, sur le ventre, la bouche légèrement entre-ouverte. Hermione s'assit près de lui en se frottant les cheveux dans une serviette. Elle avait enfilé un simple tee-shirt blanc mais avait fait l'effort de se maquiller. On était peut être un lendemain de mariage, mais il n'était pas question d'offrir un visage brouillé et une gueule de bois qu'elle n'avait pas aux autres habitants de cette maison.

Dans un grognement Drago se retourna, mais ne sembla pas se réveiller. Ses paupières étaient obstinément fermées. Il avait l'air différent. Ses cheveux en pagaille étaient si fins et si souples qu'ils glissaient sur son visage sans fouillis. C'était tout le contraire d'Hermione. Elle le regardait avec ravissement, à cet instant on aurait pu lui présenter n'importe quelle star sorcière ou moldue, pour elle le plus ravissant des spectacles aurait été celui qui s'offrait à elle : Drago endormi, les cheveux gras et la peau moite. Elle caressa son visage du bout des doigts et dit pour elle même

« Maintenant nous sommes responsables de la réussite ou de l'échec de notre couple. »

Il y avait quelque chose de solennelle pour elle dans la formulation de cette phrase. Plus aucune malédiction ne pesait sur leurs épaules, ils étaient libres de s'aimer, et elle avait coscience que ce serait parfois quelque chose de difficile à vivre au jour le jour. Mais elle se sentait la force de lutter pour ce qu'elle savait être la plus importante décision de sa vie.

Drago grimaça, il n'appréciait pas le contact de ce doigt sur son visage apparemment. C'était une caresse pourtant. Hermione enleva la serviette de ses cheveux et s'approcha de son fiancé. Elle se blottit contre lui.
-Hermione, c'est à toi ces cheveux tout mouillés qui viennent me dégouliner dans le cou ?
-Désolée.
-J'espère bien que tu es désolée, j'étais dans les bras d'une sublime créature quand un truc tout humide m'a sorti de mon rêve. La Hermione de mon rêve avait les cheveux secs elle au moins.
-Mais est-ce que la Hermione de ton rêve était en train de t'embrasser ? Dit-elle en lui déposant un baiser sur les lèvres.
-Si tu savais...

Elle éclata de rire en lui sautant dessus.
-Habile façon de me faire sortir de mes retranchements.
-J'espère que j'ai pas besoin de te mettre en concurrence avec quelqu'un, fusse-t-il avec toi même, pour que tu te montres tendre. Je croyais que ça te rendait furieuse au contraire.
-Oui évite de me refaire le plan de Caroline... Tu sais qu'il est très sexy ton pyjama ? Tu devrais le mettre plus souvent.
-Quoi ? Plus sexy que Drago en slibar, Drago en redingote ? Je suis très déçu... Moi qui croyait que c'était une semaine de vision de mon beau corps musclé qui t'avait rendue folle de moi.
-Allez, trêve de discussion, vas laver ton beau corps musclé qui pue, et ensuite on va bruncher avec les autres.
-Quoi, je pue ? Non mais je ne te permets pas !
-Non bien sûr, j'adore la subtile odeur de mâle qui se dégage de toi, répondit-elle en mimant le chaland qui se rempli les poumons devant la mer. À la réflexion c'est marrant, ça me rappelle notre première nuit ensemble. Du coup c'est pas complètement désagréable.
-Vrai ? Alors je suis plus obligé d'aller me laver ?
-Si ! Dit-elle en le poussant du lit
-Mettons les choses au clair, je suis un gentleman, très à cheval sur l'hygiène, d'ailleurs je...
-Oui oui, c'est ça, acheva Hermione en refermant la porte de la salle de bain.

Elle entendit le verrou magique se fermer.
-Dis, c'est stupide, mais je peux reprendre ma douche avec toi ?
-Non, dit une voix étouffée.



En arrivant dans la salle à manger, Hermione constata que personne n'était encore levé mis à part les mariés. La table était donc encore parfaitement présentée, débordant de mets délicieux. Cet elfe de maison français avait l'air de parfaitement remplir ses fonctions. Hermione pensa avec regret au fait que malgré toutes les évolutions en la matière, aucun elfe de maison ne s'était destiné à autre chose qu'à l'intendance des maisons sorcières pour le moment. C'était une pitié. Elle prit place à côté de Harry. Quand Drago les rejoignit il s'assit à côté d'elle.

-Alors cette nuit ? Reposante ?
-Extrêmement.
-Et Emma ?
-Pas de contraction, répondit-elle joyeusement.
-Est-ce que je dois partir ? Demanda Drago en commençant à faire racler sa chaise sur le sol.
-Non, ne t'inquiète pas, je vais pas faire de consultation sur la table du petit-déjeuné.

La nourriture reposait en abondance sur la table, mais aucun n'avait vraiment faim. Ils évoquaient tous les délices dont ils avaient profités la veille et qui expliquaient leur manque d'appétit. Un léger malaise planait et tant que personne d'autre n'était arrivé, ils prirent soin de ne jamais laisser le silence s'installer. Ginny fît son entrée, ce qui porta leur nombre à cinq et enfin Hermione ne fût pas celle qui cristallisait toutes les attentions. Les invités arrivaient au compte goutte et quand la discussion se transforma en joyeux bruit désordonné, Hermione s'éclipsa et alla s'effondrer dans le canapé du salon.

Elle ferma les yeux, espérant se reposer un peu de sa soirée. Elle sombrait lentement dans un demi sommeil quand elle sentit le fauteuil s'affaisser à côté d'elle.
-Alors, c'est l'amour fou ?
Hermione ouvrit un œil, elle avait reconnu la voix de Pansy.
-Moui... Et toi ?
Toujours relancer l'interlocuteur sur un sujet qui le concernait. Ça permettait de ne pas avoir à se soucier de ses propres réponses.
-De quoi tu parles ? Demanda-t-elle innocemment
Il fallait la lancer en plus... Elle soupira mentalement.
-Son nom commence par Ru et finit par per...
Hermione se retourna vers son interlocutrice. Pansy fît une moue boudeuse.
-Je sais pas... C'est pas... C'est pas comme je m'y attendais.
-Allez, raconte moi. Tu te rends compte qu'on est en train de discuter comme des collégiennes, toi et moi, Hermione Granger et Pansy Parkinson ? Je suis désolée, mais ça me semble toujours étrange.
-Moui, moi aussi je trouve ça un peu étrange. On a bien changé quand même... A l'époque on t’appelait Hermony l'abrutie...
-Charmant.
-Pour en revenir à Ruppert, j'ai sauté le pas jeudi comme tu le sais... En l'embrassant dans le château de sable. Il avait l'air... partant.
-Alors où est le problème ?
-En fait à part s'embrasser, on a rien en commun. Je suis plus à Poudlard, et franchement je n'envisage aucune relation sérieuse avec lui. Les rendez-vous « embrasse-moi on parlera moins », non merci. Je ne te dis même pas l'évolution adulte de ce genre de relation.
Hermione leva les yeux au ciel.
-Ouaiii, dit-elle d'un air absent.
-Tu as raison, je crois qu'il y a une partie de moi qui apprécie cette situation un peu superficielle, et l'autre qui trouve ça pas serieux.
-Ah...
-Je crois que je vais suivre ton conseil. Je dois me décider, maintenant. Qu'est ce que tu en penses ?
-Oh, moi tu sais...
-Oui, il faut pas que je laisse ça traîner. Comment crois tu que je puisse m'y prendre ?
-Pansy, je ne vois pas comment t'aider. Je crois que j'ai donné pour les petites histoires de cœur version adolescent cette semaine.
Elle se releva du canapé non sans peine, posa ses mains sur les épaules de son ancienne ennemie.
-Je te suis très reconnaissante pour ton aide, tu as certainement contribué à ma prise de conscience avec Drago. C'était vraiment une situation compliquée. Si je peux faire quoi que ce soit.
-Non, rien de particulier. Tu as été une oreille attentive, et tu as donné d'excellents conseils. Merci Hermony...
-l'abrutie, je sais. Allez, je te laisse, je dois faire mes valises, on va les laisser un peu profiter l'un de l'autre. Il est pas question qu'on monopolise le jeune couple.

Hermione remonta dans sa chambre. Elle avait quelques coups de baguette à donner. Quand Drago rentra, il la trouva assise en tailleur sur le lit, les deux miroirs en main.
-Hermione, ça va ?
-Oui... Je me demandais ce qu'on allait en faire.
Elle retournait les deux objets dans ses mains. L'un avait l'air beaucoup plus vieux que l'autre. La couleur rouge du cuir était plus délavé, un point de couture des bordure avait lâché, la surface du miroir était un peu tacheté. Il y avait une page à tourner et elle ne savait pas si elle détestait ou aimait ces artefacts. Quelque part ils les avaient unis, ils avaient permis une rencontre qui aurait été impossible sans eux, à une époque où ils se détestaient cordialement. Mais elle n'éprouvait pas le besoin de les garder près d'elle. C'était conserver un doute sur une possible influence extérieur. Et c'était exactement ce qu'elle détestait. Elle voulait avoir le contrôle sur sa vie. Elle n'acceptait ni de rejeter injustement la faute sur une cause externe, ni de subir une force contre laquelle elle ne pouvait rien.

-Alors soit on les jette, soit on les garde sous verre, soit on les cache, soit on les mange en salade, soit on les fume avec du paprika, soit on...
-Oui, je vois que tu as déjà étudié tous les possibles.
Drago grimpa sur le lit pour se trouver au niveau d'Hermione.
-On en fait ce que tu veux mon amour. Je n'ai plus aucun attachement pour eux. Ça a été longtemps le symbole de mon incapacité à te garder. Je crois que je ne considère même plus qu'ils sont les mêmes objets qui nous ont fait nous rencontrer à Poudlard.
Elle baissa la tête. Une mèche qui avait légèrement bouclé en séchant lui tomba devant les yeux. Drago lui remis derrière l'oreille.

-Tu sais que tu ressemblais à une fée hier ?
-Et aujourd'hui ?
-À une sorcière de moldu, dit-il en riant avant de l'embrasser.

Ils s'allongèrent tous deux sur le dos et restèrent un long moment l'un avec l'autre.
-Drago, tu détestes vraiment Harry ?
-Je le hais.
-Est-ce que tu verrai un inconvénient à ce qu'on offre la paire en guise de cadeau de mariage ?
-Dans la mesure où ça l'aidera à ne pas te tourner autour, pourquoi pas.
-Tu exagères, dit-elle en lui mettant un petit coup de poing dans les côtes. Bon, je prends ça pour un oui.



Hermione et Drago s'apprêtaient à transplaner vers Londres, ils avaient embrassé tout le monde. Elle avait quant à elle promis à tout le monde de rester en contact, s'en était suivi une émouvante scène avec Ginny, avec accolades, larmes en coin, recommandations pour l'avenir. Drago quant à lui avait fait un adieu assez cordiale à Caroline. Il y avait eu une certaine tension quand il s'était penché pour l'embrasser sur la joue comme de bons amis. Les seules trois personnes à ne pas être gênées étant bien entendu Hermione, Drago et Caroline elle-même. Drago ne se donna pas la peine de venir dire au revoir à Harry, mais n'oublia pas de saluer son épouse.

-Emma, j'espère que tout se passera bien pour toi. Tiens moi au courant et surtout envoyez moi le faire-part, chuchota-t-elle.
-Je n'y manquerai pas. Merci, du fond du cœur.
-Drago et moi on a un cadeau un peu particulier à vous faire. C'est quelque chose qui représente beaucoup pour nous.
-Ça vient d'Amérique latine ? Demanda Harry goguenard.
-Non, pas vraiment. Tu verras... Prenez un moment où vous êtes ensemble pour l'ouvrir. C'est très important. Ne laissez personne d'autre que vous deux utiliser, ou même toucher ces objets.
-Tu commences à me faire peur, l'interrompit Emma avec un petit rire.
-Allez, profitez bien de vos vacances, dit Hermione en prenant les deux mariés dans ses bras.

Elle et Drago transplanèrent. Ils venaient de quitter la France laissant derrière eux l'ami de l'un, l'ennemi de l'autre.



-Que crois-tu que ce soit ? Demanda Emma en ouvrant délicatement le papier qui enveloppait leur cadeau.
La nuit était tombée, le dernier invité était enfin parti et ils étaient seuls, dans leur chambre à coucher.
-Je ne sais pas... Rien de dangereux j'espère, répondit Harry, laissant son imagination vagabonder.
-Par la barbe de Merlin, ce sont les miroirs. Je n'y crois pas !
-Quels miroirs Emma ?

Une feuille tomba du paquet, d'une voix assurée et scolaire Emma entreprit la lecture à voix haute.

« Ces objets nous ont autant détruits que construits. Ne soyez toujours que vous deux à les utiliser, et ne les cédez qu'en vous en détachant complètement. Ils ne peuvent fonctionner qu'à deux et accessoirement il servent à communiquer. Ne croyez pas qu'un est positif et l'autre est négatif. Le plus vieux est le miroir de la malédiction. Son rôle est d'unir les couples maudits envers et contre tout. Le plus jeune est le miroir de l'absolution. Son rôle est de mettre fin à ce qui sépare.

Le miroir de la malédiction maudit certes, mais il unit également. Le miroir de l'absolution bénit certes, mais ne rassemble pas. Comprenez bien que lui seul n'est d'aucune utilité : quand bien même il n'y aurait aucun obstacle à votre amour, cela ne serait pas suffisant pour que vous vous aimiez.

Êtes vous prêts à passer par le feu et les larmes ? Êtes vous prêts à subir ce qui forgera votre âme ?

Tous nos vœux de bonheur.

Sincèrement,

Drago et Hermione »

-Que risque-t-on après tout ? À par un amour éternel ? Demanda Harry.
-Oui, que risque-t-on à part le feu et les larmes ? Répondit Emma en souriant.
-Allez, donne moi mon cadeau. Alors quel sera le mien ? La malédiction ou l'absolution ?



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire